Vendredi 13.
Comment se
fait-il que la publicité pour les jeux de hasard désigne le vendredi 13 comme
un jour de chance ? J’espère qu’après le vendredi 13 novembre 2015
une prudente curiosité incitera les amateurs de grattage à chercher
l’origine et le sens premier de cette date.
Depuis
quelques jours il n’est que fureurs et frayeurs en France, en Belgique, en
Tunisie, en Syrie…. L’horreur, les balles et la haine ont frappé. Plus de 400
familles sont touchées. Laissons les commentaires de l’actualité aux
journalistes et aux politiques. On entend dire qu’il y aura un « avant » et un
« après » cette date. On peut en douter si nous ne changeons pas
fondamentalement la loi de l’histoire.
Il semble que
la marche du monde, depuis les origines, réponde à une loi immuable : la loi de la vie gagnée et maintenue par la mort
des autres vivants. La vie conservée, gardée, défendue, développée, enrichie,
exaltée semble être la loi commune de la nature depuis toujours. C’est en elle
que réside le « salut » pour employer un langage religieux. « La vie doit
continuer » a-t-on entendu après les massacres parisiens. Mais quelle vie
? Celle qui suppose la lutte, la défense, la guerre aux dépens des autres vies
? Cette vie-là donne la mort. Celle des autres et la nôtre. Peut-être pas au
bout du fusil ou dans l’explosion de la ceinture dynamitée mais dans la réalité
quotidienne ; celle-ci postule que la vie « gardée » suppose la mort « donnée
».
Rappelons-nous la sentence évangélique : « Celui
qui garde sa vie la perdra… »
Peut-il y
avoir une autre vie, une autre mort ?
Un homme,
Paul, n’hésitait pas à dire « Pour moi vivre c’est le Christ et mourir m’est un
gain » (Ph1,21) ; « Je ne veux savoir d’autre chose que Jésus crucifié »
(1Co 2,2). De quelle mort fait-il l’apologie celui qui a fait l’expérience d’un total
reversement. La folie de Dieu, dit-il, s’oppose à la sagesse des hommes. Et
cette folie consiste à lier le salut à la mort d’un crucifié. (1Co 1,23). Mais,
ici encore, quelle mort ? Non pas la mort donnée aux autres pour éviter la
sienne ou la mort subie comme l’effet du hasard, mais la mort volontairement
offerte, acceptée, franchie comme le sommet lumineux d’une vie elle-même
livrée, partagée, mangée, rendue à Dieu et aux autres. Le salut est dans cette
mort-là.
Une image peut
nous aider. St Jean Chrysostome nous donne celle du serpent. Le serpent peut y
laisser sa peau, on peut même le trancher, tant qu’il ne perd pas la tête, il
ne meurt pas. La tête pour nous, dit le Patriarche de Constantinople, c’est
notre Foi. C’est elle qui peut faire de la mort offerte, la source d’une vie
autre.
En fait, il y a une loi et une voie.
La loi de la
vie volée par la mort infligée. Il n’y a, dans ce cas- là, ni avant ni après ;
c’est le règne de la violence cyclique sans cesse renouvelée et sans
cesse alimentée. La loi est sans issue.
Une voie :
celle de la vie partagée jusqu’à la mort offerte que personne ne peut nous
voler puisqu’elle est déjà donnée. La voie est ouverte sur un au-delà possible.
J.C
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