20 décembre 2018

« Souhaits décalés pour des temps nouveaux»






La nuit de Noël ne sera guère étoilée pour beaucoup de nos frères humains et le jour de l’an nouveau n’allumera pas le feu de l’espérance attendue. Pourtant, dans la grisaille des têtes et des cœurs, l’Enfant de la crèche interpellera tous les besogneux de la terre qui voudront bien l’écouter : « Venez à moi, vous tous qui ployez sous le fardeau ». Et Il ajoutera : « Je vous procurerai des richesses dont on ne parle plus : la fierté du travail bien fait ; le goût de la conscience professionnelle ; la dignité de celui qui assume ses responsabilités ; le sourire attendri de vos enfants ; l’honneur de servir vos frères ; la fraternité des humbles».

A ceux qui dirigent le peuple, qui gèrent le présent et préparent l’avenir, Il rappellera : « Que le plus grand parmi vous se comporte comme celui qui sert et il connaîtra la satisfaction de contribuer au bien public ; la joie de voir s’épanouir ses collaborateurs ; la reconnaissance de ses élèves devenus plus compétents que lui; le plaisir de rendre à la nation ce qu’elle lui a donné ; l’impression d’avoir laissé une trace sur le chemin de la vie ».

Autant de trésors immatériels, non-calculables, partageables à l’infini et qui se suffisent à eux-mêmes. Les monnayer serait les dénaturer.

Et tous s’écrieront : «Utopie d’irréaliste illuminé! Propos de mythomane dangereux! Etalage d’incompétence caractérisée! Et le pouvoir d’achat prioritaire? Et les bénéfices à  réinvestir? Et les impôts obligatoires ? De quel monde parle-t-il ?

Alors, l’Enfant de Noël leur dira : « Depuis que l’homme existe, vous avez essayé toutes les recettes pour être heureux de vivre ensemble. Aucune n’a réussi. Vous vous acharnez à guérir le mal avec les plantes vénéneuses qui l’ont provoqué. Vous n’attaquez pas les causes premières. Alors, cherchez d’abord le Royaume de Dieu et vous trouverez la véritable justice. N’amassez point de trésors sur la terre où la mite et le ver consument, où les voleurs perforent et cambriolent…Accueillez la richesse de mon Esprit vivant... Et avec l’argent, faites-vous des amis, car là où est votre trésor, là aussi sera votre cœur. »

 Quand les cris de colère se tairont, tendons l’oreille pour entendre ce que nous dit l’Enfant de la crèche dans la grisaille de notre vie, l’œil fixé sur l’étoile du lointain qui ne s’éteint pas…Et que ce Noël et cet an neuf soient pour chacun et chacune l’occasion d’une joyeuse renaissance !


07 décembre 2018

La faillite.



On aura beau élever des montagnes de commentaires comme c’est le cas ces jours-ci, la violence qui couve et qui se déchaîne dans notre pays signe paradoxalement la faillite du « gagner plus ». Tant que ce « gagner plus » sera érigé en arc de triomphe au sommet de la vie du citoyen, le jeu des convoitises et des frustrations attisera la guerre des uns contre les autres. Tant que le goût de l’infini, qui marque la différence humaine, n’aura d’autre horizon que l’accumulation des biens, l’épuisement de la planète ira de pair avec la ruine des moins avantagés. Et ceux-ci casseront l’idole d’or, faute de pouvoir l’embrasser.

La colère du peuple rejoint celle du prophète Isaïe qui, déjà à son époque, ne mâchait pas ses mots : « Ton argent est devenu de l’écume…Tes chefs sont des rebelles, complices des voleurs. Tous ils aiment les présents, ils courent après les gratifications ; ils ne rendent pas justice à l’orphelin et la cause de la veuve n’arrive pas jusqu’à eux » Is 1,22-23

Certes, une mesure de justice s’impose car sur l’échelle des valeurs économiques l’écart des revenus est indécent et on ne comprendra jamais ce que peuvent bien signifier ces fortunes privées que plusieurs vies ne suffiraient pas à épuiser. Mais un geste fort souhaité en ce sens ne sera efficace qu’en changeant les critères de la réussite humaine et qu’en déboulonnant l’idole de Mammon que l’on a réussi à introduire dans le panthéon de chacun. Mais alors, par qui remplacer Mammon ? Par Celui qui n’a rien mais qui Est tout ; par Celui qui nous fait grandir et gagner en partageant ; par Celui que nos soi-disant sages ont recouvert du voile de leur autosuffisance.

Le temps de Noël qui approche sera-t-il favorable à ce renversement des valeurs ? On peut en douter quand le jeu préféré des enfants d’une maternelle consiste à comparer le nombre des jouets reçus à l’occasion de cette fête et qu’aucun adulte n’intervient pour stopper ce genre de compétition! La vraie révolution commence à Noël quand des pauvres se trouvent enrichis en  étant comblés de la sollicitude de Dieu et que des riches se trouvent indigents devant Celui qui n’a pas voulu garder pour Lui sa condition divine et s’est fait pauvre pour tous… Et que les uns et les autres en tirent toutes les conséquences !
"L'âne se jette à l'eau" aux éditions Médiaspaul.