13 octobre 2022

Missionnaires et desservants.


 Quel dommage d’avoir déposé le mot « desservant »  dans le cercueil d’une langue morte ! Il se disait d’un prêtre chargé du service d’une paroisse. Il se glissait encore sous la plume de Daudet et sur les lèvres de Don Camillo. Il magnifiait le verbe « servir » sans le compromettre par le voisinage plus prestigieux du curé ou du doyen qui lui aurait fait oublier son modeste rang.


Un congrès de la mission s’est tenu récemment à Paris. Le qualificatif « missionnaire » s’emploie souvent pour désigner des équipes de croyants convaincus, souvent jeunes, qui abordent les gens dans la rue, sur les plages, au cours des festivités, en les interrogeant sur leurs croyances et en leur présentant Jésus comme notre sauveur. La surprise peut se traduire par un sourire étonné devant la fraîche spontanéité de ces jeunes ou par un refus courroucé face à ce qui peut paraître une intrusion sans précaution dans la conscience de chacun. La méthode est celle de l’interpellation. Elle est adaptée à notre temps qui voit grossir de plus en plus la masse de celles et ceux qui sont les orphelins de toute tradition religieuse ou les rejetons de l’athéisme officiel du 20ème siècle. En revanche, les « post chrétiens », qui ont encore quelques relents d’un catéchisme mal digéré, accueillent ces nouveaux missionnaires avec un regard soupçonneux. Cette méthode importée des grandes métropoles cosmopolites mériterait une fine connaissance des mentalités locales.


L’interpellation directe, forcément rapide, court également le risque de présenter le croyant comme un individu bardé de certitudes pratiquant un prosélytisme sans retenue. Or, on « n’a » pas la foi  comme un paquet de convictions acquises une fois pour toutes et que l’on ne remet jamais en question. Etre croyant ou essayer de l’être est une autre histoire car c’est effectivement l’histoire d’une longue fréquentation de Dieu et d’un combat intérieur à l’image de celui de Jacob avec l’ange.


Missionnaires et desservants, si les deux se donnaient la main ! Des missionnaires respectueux de leurs interlocuteurs sont indispensables car « comment croire si personne ne parle » rappelle St Paul. Il faut ensuite des desservants qui nourrissent et maintiennent vivante la foi en essayant de ne pas trop la « desservir » dans le sens négatif du terme. La formule « disciples-missionnaires » voudrait y parvenir.

 

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