28 février 2025

« Doux et humble de cœur »


 Le Pape a fait du « cœur » le sujet de sa dernière encyclique. Les plus anciens d’entre nous se souviennent, peut-être, avoir vu, cloué sur les portes d’entrée de nos maisons ancestrales, une image du Christ montrant son cœur transpercé et rayonnant de l’amour infini de Dieu. Souvenir visuel de quelque mission paroissiale qui avait laissé des traces. L’écriture de « Laudato Si » et « Fratelli Tutti » avait dessiné et renforcé le portrait d’un Pape que certains qualifient de « politique », l’accusant même d’ingérence sur des sujets qui ne seraient pas de son ressort comme le sort des migrants. Conscient du danger de se voir enfermer dans un portrait de dirigeant d’ONG, François nous offre avec « Dilexit nos » une magistrale leçon de mystique en parcourant des siècles de dévotion au Sacré Cœur. Fidèle à son attachement aux piétés populaires, il met en garde celles et ceux qui sous prétexte de rationalité intelligente rejetteraient dans les limbes de la sensiblerie cette expression de la Foi et de la prière (160). 

Prenant le relais de Fratelli Tuttti qui s’ouvrait sur une analyse lucide et sans concession de notre monde « liquide »(9), il déploie toutes les exigences de cette spiritualité dans l’agir des chrétiens. A signaler également dans le deuxième chapitre de Fratelli Tutti un commentaire détaillé et éclairant de la parabole du Fils prodigue.

Reprenant à son compte les vieilles expressions de « consolation », de « componction » et de « réparation » François nous invite à devenir par la prière et par l’action des réparateurs de notre monde (181). En effet, ce n’est pas parce que nous aurons rebâti Gaza ou l’Ukraine que nous pourrons instaurer une paix durable. Il faudra aussi et surtout réparer les cœurs et ceci dépasse le domaine de notre justice humaine. Seul « notre cœur uni à celui du Christ est capable de ce miracle social »(28). 

Conseil avant lecture : Ce n’est pas parce que le Pape en bon hispanique use volontiers du tutoiement et qu’il fait allusion aux dévotions de sa grand-mère que la lecture de son texte en est facilitée. Il reste un jésuite aux vastes références culturelles et spirituelles.  

La numérotation des citations est celle de l’édition commune Bayard, Cerf et Mame.

01 février 2025

Présentation

  Dimanche nous fêterons la présentation de Jésus au Temple. Il y a quelques jours, en la fête de l’Epiphanie des exclus (les bergers), et des étrangers (les mages) avaient découvert  l’enfant- messie à la barbe des puissants (le roi Hérode et ses conseillers) : 1ère présentation. Le déplacement  au Temple répondait à un précepte de la Loi demandant que tout premier né ouvrant le sein maternel fût consacré à Dieu et renvoyé à son origine par son « sacrifice » (qui rend sacré). Cette même Loi permettait de remplacer l’être humain par un animal et atténuait ainsi la barbarie des coutumes antiques. Ce passage par le temple redonnait aussi à la mère la possibilité de réintégrer la vie commune, en retrouvant la pureté rituelle qu’elle avait perdue en s’associant à l’acte créateur de la vie.

 
Par delà le souvenir de la plaie des 1ers nés de l’Egypte durant l’exode, cette présentation rituelle trouve peut-être sa source dans le réflexe commun qui veut que toute offrande appelle un rendu. Qui ne se sent pas obligé, dans un geste de partage, d’apporter quelque chose lorsqu’il répond à une invitation ? Geste écologique avant l’heure puisque l’échange évite l’épuisement trop rapide des ressources.


En remplaçant le sacrifice humain par celui de l’animal et en le proportionnant aux revenus de la famille, la Torah faisait faire un bond dans le registre d’une plus grande humanité. L’histoire d’Isaac remplacé par le bélier et celle de Samuel offert au service du prêtre Eli sont de cet ordre là. Plus tard encore dans l’histoire, quand le peuple de Dieu en captivité fut privé de temple, le signe de l’eau remplaça celui du sang et le sacrifice des lèvres (la prière) celui de l’animal. Jésus reprit à son compte la requête qu’Osée met dans la bouche de Dieu : « C’est l’amour que je veux et non les sacrifices ».


Enfin et surtout, il nous offrira une dernière « présentation », celle de sa mort sur la croix offerte au Père et à l’humanité. Présentation de la vie d’un Fils premier né, consumée dans un amour infini et consommée dans l’Eucharistie partagée.
Ainsi de présentation en présentation le Père nous offre le Fils. A nous de rendre au moins notre reconnaissance, notre action de grâce comme Siméon qui chante la lumière « venue d’en haut » d’où notre chandeleur!