A quelques rafales de là, j’entrais sous la coque renversée d’une barque-chapelle échouée sur le sable. Dans le clair- obscur du chœur, quelques religieuses, courbées sous leur voile protecteur et le poids des ans, glissaient en silence pour prendre place et chanter l’office divin. Comme chaque jour, à la même heure, avec les mêmes gestes, indifférentes aux vociférations de leur bruyant voisin, ombres silencieuses, elles entonnaient les psaumes. Par leur calme obstination, elles défiaient sans le savoir les flots en furie qui crachaient leurs insultes à l’espace et au temps. Cette lande de sable inculte, devenue au siècle dernier, par le génie d’un prêtre de Bayonne, le port où accostaient toutes les misères et le filet où s’accrochaient à la charité des sœurs tous les rejets de la houle humaine, leur donnait les raisons de se tenir à la prière. Tout près du sanctuaire, un alignement de petits monticules réguliers parsemés de coquilles blanches, leurs humbles tombes, les appelaient vers le temps définitivement apaisé. Le monde pouvait souffler en tempête, la barque pouvait être renversée, les « Bernardines » et leurs sœurs jumelles, « Servantes de Marie » étaient insubmersibles.
« Où demeures-tu ? » demandaient les disciples à Jésus. A la faveur d’une pause de la grande plainte de la terre et des flots, il devenait clair que les héritières de celles qui avaient fait fleurir le sable, demeuraient déjà, ailleurs, en compagnie de Celui qui commande à la mer et au vent.