20 février 2007

« Le Maître du désir »

C’est le titre donné à un ouvrage de commentaires sur l’Evangile de Jean par son auteur, Eloi Leclerc (1). Le blog précédent sur la Samaritaine permet justement d’apprécier le pédagogue exceptionnel que fut Jésus et comment Celui qui savait « ce qu’il y a dans le cœur de l’homme » a su transformer le besoin en désir. C’était le besoin qui poussait la femme à venir puiser d l’eau. Mais par une succession de symboles (eau du puits, eau vive, seau pour puiser, eau qui désaltère) qui chacun exprime un aspect de la Torah pour des juifs, Jésus amène son interlocutrice à manifester sa soif de vie éternelle.
Quand l’homme en reste à la satisfaction de ses besoins il ne peut que s’étourdir dans la recherche du plus : Plus d’avoir, plus de pouvoir, plus de sensations. La publicité joue sur ce registre en créant des besoins dont la satisfaction apparaît nécessaire et impérative. Une société régie par l’économie ne peut qu’empiler les besoins et tromper ses esclaves consentants.
Le désir nous place dans le registre du choisi et non plus du subi. Il déplace et dépasse le besoin. Au besoin de manger on répond par l’alimentation ou par la bouffe avalées en « stabulation libre » dans les cafétéria. Au désir de rencontrer par le partage du pain, on répond par un repas préparé ou improvisé mais, surtout,désiré. Dans le premier cas, l’aliment est essentiel soit dans sa quantité soit dans sa qualité. Dans le second, le menu n’est qu’une bonne occasion d’échanges enrichissants et d’autres nourritures.
L’expérience commune du besoin et du désir, c’est que leur quête n’en finit jamais. Dans cette course infinie le besoin divise, épuise ou écoeure. Dans le cas du désir ce qui est partagé ou consommé ne diminue pas mais au contraire s’accroît au fur et à mesure que l’on en use.
Un jour ou l’autre cet être insatiable d’infini qu’est l’homme se demande d’où lui vient ce manque infini que traduisent les besoins ou les désirs. N’y a-t-il pas là chez lui comme une marque originelle de son créateur ? Marque originelle qu’il peut transformer en enfermement (et dans ce mot il y a l’enfer) définitif ou en ouverture vers l’Autre. Alors l’alimentation n’est plus consommation, elle n’est même plus repas, elle est Eucharistie. Le besoin de manger pour subsister devient désir de la Vie.
« Supposons que tu veuilles remplir une sorte de poche et que tu saches les grandes dimensions de ce qu’on va te donner, tu élargis cette poche…Tu sais l’importance de ce que tu vas y mettre, et tu vois que la poche est trop resserrée : en l’élargissant, tu augmentes sa capacité. C’est ainsi que Dieu, en faisant attendre, élargit le désir ; en faisant désirer, il élargit l’âme ; en l’élargissant il augmente sa capacité de recevoir. » St Augustin.

(1) « Le maître du désir » Eloi Leclerc ed DDB

3 commentaires:

Anonyme a dit…

"Dieu sait assurément ce dont nous avons besoin, mais il veut que notre désir s'enflamme dans la prière pour nous rendre davantage capables de recevoir ce qu'il nous prépare."
Augustin d'Hippone

Anonyme a dit…

"Mon Dieu, vous me faites exister creusé. De cela je vous dois amour, parce que c'est en proportion de ce qui a été creusé que je serai rempli." Abbé Pierre

J.CASANAVE a dit…

merci de demeander au grand Augustin et à l'abbé Pierre de commenter cet article

"L'âne se jette à l'eau" aux éditions Médiaspaul.