24 janvier 2007

Abbé Pierre
Hommage unanime à l’abbé Pierre…Mais nous sommes en France, « fille aînée » de l’Eglise. Aussi la plupart des commentateurs de sa vie et de sa mort soulignent son humanisme et évitent soigneusement d’en citer la source d’inspiration c'est-à-dire la Foi du chrétien, la prière du croyant, la lecture de l’Evangile et la célébration de l’Eucharistie du prêtre qu’il était. Continuons à avoir honte de notre héritage ! Nous pleurerons le jour où d’autres le jetteront à la poubelle !
Ceci dit, j’espère que beaucoup de Français ne se contenteront pas d’afficher leur émotion d’avoir perdu un grand père mais ouvriront les livres récents publiés par l’abbé et apprécieront la profondeur de ses analyses et la lucidité de sa Foi. Pour ma part je retiendrai une de ses expressions qui résume à elle seule le saut de la Foi que nous devons faire quand nous avons épuisé les ressources de notre entendement : « Malgré tout ». Dans ce « malgré tout » se lisait toute la détresse de celui qui se savait impuissant devant l’énormité du mal et tout le reproche qui pourrait effleurer les lèvres de notre prière quand on s’adresse à un Père. « Malgré tout » Dieu est Amour aimait-il à répéter…

19 janvier 2007

Homme ET Dieu.
Ceux et celles qui ont suivi la finale de mon exposé sur l’évangile de Luc trouveront, je l’espère, ici, quelques repères pour reprendre laborieusement l’épineuse question de l’Incarnation. La question de l’identité de Jésus a failli faire éclater l’Eglise des origines (Arianisme, Nestorianisme, Docétisme etc.) et n’a cessé depuis lors, d’être la toile de fond de toutes les questions qui agitent la communauté des chrétiens. La dernière polémique concernant le rite de St Pie V n’échappe pas à ce décor. Nous retrouvons les tenants d’une liturgie qu’ils considèrent comme action avant tout divine s’indignant contre ceux qui auraient trop tendance à favoriser sa dimension humaine. La même interrogation de fond sous tend les derniers sondages publiés par « Le monde des religions ». Ils mettent en évidence une majorité de catholiques qui n’éprouvent pas la nécessité d’affirmer la divinité du Christ. Homme OU Dieu ; Dieu ET Homme ?
Notre tendance première est d’opposer les deux réalités. Plus Jésus serait Dieu moins il serait homme ; plus il serait homme moins il serait Dieu. Telle est notre logique !
L’exposé de notre théologie n’a pas toujours arrangé les choses. On nous parle de nature et de sur nature, de création et de rédemption, de liberté et de grâce, de divin et d’humain comme si toutes ces réalités se superposaient, s’ignoraient ou s’opposaient. Il en résulte un effet de plaquage : la surnature venant se superposer à la nature sans que cela ne change rien à celle-ci. C’était l’idée de ceux qui pensaient que Jésus n’avait pris qu’une apparence humaine. Cette pensée en binôme peut laisser croire aussi que l’humanité peut neutraliser la divinité. Ainsi raisonnaient ceux qui s’interdisaient de croire en un Jésus-Dieu. Le rapport divinité et humanité peut aussi se concevoir sous le mode de l’absorption (l’humanité s’effaçant devant le divin)ou de l’instrumentalisation (L’humanité n’étant que le marchepied de la divinité.) Enfin, le manichéisme est allé jusqu’à opposer l’une et l’autre réalité, l’une penchant vers le Mal et l’autre vers le Bien.
Toutes les hérésies du début de l’Eglise se résument en deux cas de figure. Soit Jésus se présente comme un Dieu qui a fait semblant d’être un homme, soit c’est un homme qui est devenu Dieu. Dans les deux cas Jésus est pour nous un MODELE et non pas un SAUVEUR. C’est tout l’enjeu de ce qui pourrait nous apparaître comme des polémiques de théologiens tatillons Les premiers conciles affirment qu’Il est TOTALEMENT Dieu ET TOTALEMENT homme sans qu’il y ait confusion mais plutôt communion des natures. Et c’est parce qu’Il est totalement l’un et l’autre qu’Il peut être le sauveur ou le « grand prêtre » définitif comme St Paul le développe dans la lettre aux Hébreux.
Voici quelques clefs qui, à défaut de rendre compréhensible ce qui reste le mystère de la personne unique de Jésus, peuvent aider à éviter les simplifications.
C’est le même Dieu qui crée et qui sauve. Dès l’origine Dieu nous crée pour nous introduire dans sa vie, dans un seul « geste » créateur et sauveur. C’est pour nous faire participer à sa divinité qu’Il nous crée. Il n’y adonc pas opposition entre création et rédemption, nature et surnature etc.…
Quant à l’homme, la Bible nous dit qu’il est crée à « l’image de Dieu et à sa ressemblance ». Autrement dit plus il est « humain » ou « humanisé » plus il est image de Dieu. On peut dire également que c’est dans l’exercice même de sa proximité, de sa ressemblance avec Dieu qu’il accomplit son humanité.
Mais l’image n’est plus ressemblante. Le péché l’a ternie, l’a déformée, l’a même rendue incapable de refléter la vérité de Dieu. L’homme ne peut même plus accéder à une juste image de Dieu, il devient une « machine à faire des dieux ».
Grâce au don et au pardon offerts par le Christ, c'est-à-dire par grâce, non seulement l’image est restaurée mais la ressemblance est retrouvée. Il faut en effet sortir de l’idée du modèle ou du sauveteur pour penser « sauveur ». Avoir un modèle dans la vie est certes intéressant mais il ne suffit pas. Un suicidaire se débat dans le courant où il a plongé. Il ne suffit pas que de la berge je lui indique, tel un bon modèle, les mouvements de la natation pour qu’il s’en sorte. Si je plonge et que je vais le repêcher, je me comporte en sauveteur et non en sauveur. Il n’atteindra son SALUT que si en outre il guérit de sa dépression. Le Christ non seulement rectifie notre image du vrai Dieu mais nous guérit du péché qui la faussait. Ainsi Il restaure en nous notre humanité et nous établit déjà dans la capacité de communier à la vie de Dieu.
Ce que l’homme reçoit et réalise par la grâce, le Fils le réalise par nature. Ainsi dans la mesure où il déploie sa nature divine, il ne contredit en rien sa nature humaine, au con traire Il l’accomplit. Comme l’enfant ne ressemble totalement à son père que lorsqu’il a atteint son autonomie et sa maturité ainsi chez le Fils l’accès à son autonomie humaine ne diminue en rien sa communion intime avec son Père. C’est dans l’extrême de son humanité qui n’est que don et pardon, qu’Il nous révèle sa divinité et celle du Père.
Nous pouvons peut-être mieux comprendre pourquoi Jésus révèle sa divinité en prenant le contre-pied de l’idée de Dieu que voudrait lui imposer Satan dans les tentations au désert (Lc 4). En effet, Il va refuser le pouvoir magique de transformer des cailloux en pain ; le pouvoir absolu sur les royaumes terrestres et enfin l’exploit gratuit de l’invincibilité. Au contraire, le pain Il le multipliera mais à partir de l’offrande et du travail de l’homme. Du royaume, il en parlera, non pas comme le lieu de l’exercice du pouvoir mais comme le résultat de la conversion du cœur. Enfin le temple de pierre sera jeté à bas mais lui, temple nouveau montera sur la Croix et n’en descendra pas.
« Si tu es Fils de Dieu !...», la tactique de Satan n’a pas changé depuis la Genèse. Il avait tenté l’homme non pas en lui proposant de revenir à la bestialité, mais par le meilleur de lui-même : Vous serez comme des dieux…Il est le Malin. Pour Jésus même approche ; « Si tu es Fils de Dieu… » alors, montre toi comme un dieu tel que nous le souhaitons. Un dieu qui n’est atteint ni par la faim, ni par la limitation, ni par la souffrance. Jésus refuse ce dieu là. C’est en devenant lui-même pain à partager dans l’Eucharistie, Royaume ouvert aux petits aux non puissants, Temple d’une offrande définitive et sans péché qu’il manifeste à la fois sa totale humanité et sa totale divinité. C’est peut être dans ce sens qu’il faut comprendre le mot de Paul dans l’hymne aux Philippiens : « Reconnu Homme à son aspect…Ph 2,7 » C’est dans la reconnaissance de son humanité dépouillée de tous les attributs idolâtres que se dévoile sa divinité.

Dire non à dieu, par fidélité à Dieu, c’est la démarche de toute la Bible » Jean Sulivan.

18 janvier 2007

Lecture interdite aux moins de 30 ans…
« Je ne sais pas » ce qui se passe mais les « je ne sais pas » commencent à sérieusement submerger la terre ferme de mes vieilles certitudes.
Ai- je réussis ma vie ? Je ne sais pas…
Ai-je développé toutes mes capacités ? Je l’ignore…
Ai-je vraiment aimé ? Je n’en suis pas certain…
Ai-je tenu la place qui était la mienne? Encore moins…
L’histoire a-t-elle un sens ? Je ne sais plus…
La politique mérite-t-elle la place qu’elle se donne ? J’en doute de plus en plus…
Le monde connaîtra-t-il la paix ? Je ne sais pas…
Hier valait-t-il mieux qu’aujourd’hui ? Pas sûr…
Au moment où un honnête bilan s’imposerait, où les questions essentielles pour la vie devraient être résolues, l’inconfort de la navigation s’accentue. Deux solutions : ou bien lâcher le gouvernail, enfoncer son bonnet de marin sur les yeux et s’assoupir dans un sommeil bienheureux et provisoire ; ou bien s’en remettre au G P S actuel et confier la conduite automatique à une opinion publique soumise à ses souteneurs comme une femme tout aussi publique.
Le continent de mes anciennes assurances s’effrite par pans entiers. Il laisse place à un archipel flottant de « peut être » et de « je crois que »…
C’est la raison pour laquelle il me faut quitter cet archipel lui-même, affronter les flots des incertitudes, rester dans ma petite barque et empoigner une longue rame qui s’appelle « Je crois en… » Il arrive parfois à cette perche de toucher le Roc d’un continent disparu mais solide.
En fait, je sais ce qui se passe : Il y a 30 ans, je me fiais aux arguments péremptoires comme à des amarres incassables, aux synthèses lumineuses comme autant de phares antibrouillards, aux référents incontestables comme à des bouées insubmersibles. Sous l’effet de la houle et de la rouille, les « je ne sais pas » et les « je ne sais plus » ont refait surface et encombrent le port. Bon vent à tous !

04 janvier 2007

Année nouvelle.
L’homme est un bien curieux animal. Sait-il qu’en fêtant bruyamment et chèrement la soirée du 31 décembre, il se réjouit d’une année de plus qui le rapproche de la mort ? Pour celui qui ne croit en aucune survie, il n’y a pas de quoi exulter ! Serions nous donc tous croyants ? Ce genre d’occasion rapproche ceux qui estiment que la fête est une activité humaine indispensable, ceux qui espèrent que demain sera meilleur qu’hier, ceux qui parient que la lumière renaîtra des ténèbres et ceux qui croient qu’une année de moins nous rapproche du « Soleil levant lumière d’en haut qui vient nous visiter… »
"L'âne se jette à l'eau" aux éditions Médiaspaul.