27 juillet 2006

Concert.
Il devient de plus en plus fréquent de voir nos vieilles églises rurales, souvent joliment restaurées, servir de salles de concert. Deux artistes locaux se produisaient, il y a quelques jours, dans celle de mon village. Un pianiste et une violoncelliste. Chopin, Schubert, Grieg figuraient au programme. Le maire fit un discours de bienvenue, un silence « religieux » s’instaura et la « grande musique », comme on disait dans mon enfance, nous régala.
Emporté par la virtuosité des acteurs et les sonorités des instruments, je me demandai, une fois de plus, quelle était la part du piano et celle du pianiste ; qu’est qui était du violon et qu’est ce qui était de la violoncelliste ; quel était le rôle de l’assemblée et celui des lieux ? Sans oublier celui de l’auteur ? Chacune des parties se révélait indispensable à l’ensemble ; chacune se faisait oublier pour mettre l’autre en valeur ; aucune cependant ne se confondait avec une autre. Peut-on dire qu’il en va de même de l’inspiration des textes sacrés ? Comment partager, dans une page du livre d’Isaïe, ce qui est de l’Israélite vivant au 7ème avant Jésus Christ dans un pays défini, déchiré par des conflits régionaux et ce qui dépend du croyant inspiré relisant son histoire et celle de son peuple à la lumière divine ? Et 28 siècles plus tard, cette parole qui féconde encore la vie d’un croyant d’aujourd’hui, n’est-elle pas « inspirée » pour celui ou celle qui le côtoie et en qui elle résonne encore ? L’inspiration ainsi comprise n’a rein à voir avec le clic du « copier-coller », auquel on veut encore réduire la rédaction des textes fondateurs des religions révélées !
Revenons à ma petite église. Curieuse France républicaine où un an après le centenaire de la séparation des Eglises et de l’Etat, le maire reprenant la parole « priait » chacun de bien vouloir partager une boisson rafraîchissante dont le public avait bien besoin ! Que dirait le prophète ? Apaisement et réconciliation des « deux France » ? Ouverture et souci du Bien commun de la part de la communauté catholique ? Reprise en main déguisée de bâtiments déjà spoliés par l’Etat ? Substitution d’une Eglise qui ne peut plus se permettre d’entretenir des artistes au service de sa liturgie, par un Etat qui dispense ses subventions en conservant les œuvres du passé ? Comment éviter que nos vieilles églises ne deviennent bientôt des « conservatoires », y compris d’une religion des ancêtres!!

24 juillet 2006

« Reposez-vous un peu »
« Venez à l’écart et reposez- vous un peu » (Mc 6,31), c’est le conseil que donne Jésus à ses apôtres de retour de mission. Ceux-ci ont à peine le temps de faire un compte rendu de leurs activités, que Jésus, sans attendre de faire un bilan, sans examiner si les objectifs sont atteints, leur enjoint de se reposer. Joli pied de nez à notre société qui ne pense qu’en termes d’étude de marché, de résultats obtenus ou d’objectifs réussis. Avant Lui, un Autre s’était reposé le 7ème jour. La Bible indiquait ainsi que le but de la création n’était pas dans le projet réalisé mais dans l’Auteur à contempler et à aimer.
Une fausse idée voudrait nous faire croire que notre société de loisirs répond au dessein de Dieu sur l’humanité, enfin libérée du travail. Les 35 heures et les RTT seraient une application moderne du « reposez- vous un peu ». Ce serait confondre « loisir » et « repos en Dieu ». Or nous savons bien qu’il existe une sorte de frénésie de loisirs qui n’a pour but que de distraire du présent,de fuir les questions importantes que la réalité de nos vies nous impose, mais auusi de remplir les tiroirs caisses. Que de loisirs finissent par devenir des occupations harassantes et parfois abrutissantes !
Au stress, à la pression, à l’énervement permanent et entretenu opposons le calme et la sérénité de ceux et celles qui croient davantage à la fécondité d’une présence gratuite qu’à l’efficacité d’une agitation débridée.

12 juillet 2006

Benoît.
Dans les volutes d’encens et les mélodies grégoriennes, les bénédictins de Belloc et leurs sœurs voisines, ont fêté Benoît leur père fondateur et patron de l’Europe .Encore sous le coup des liturgies névrotiques et dramatiques du mondial de foot, quelques amis de l’abbaye plongés en douceur dans la beauté et la simplicité des rites, ont pu évacuer les miasmes du grand cirque païen. Les bénédictins sont restés les grands maîtres d’une liturgie de la maîtrise de soi et de la retenue qui focalise l’assemblée non pas sur les acteurs mais sur l’Autre. « Quand deux ou trois se réunissent en mon nom, Je suis, au milieu d’eux… » Un certain cardinal amateur d’une « réforme de la réforme liturgique » et du latin asiatique devrait venir passer quelques jours à Notre Dame de Belloc. Il se souviendrait peut être que notre Dieu a quitté les cieux pour s’incarner dans les visages d’une multitude et que s’il y a pour nous un symbole matériel de Présence, c’est l’autel de l’Eucharistie et non plus le temple céleste des divinités naturalisées.
Amis lecteurs, pour ce temps de moindre activité « bloggeuse », je vous propose de méditer quelques extraits de l’hymne de la fête de St Benoît :
Vivre à Dieu seul
Et se tenir en sa présence,
Tout quitter pour attendre la paix
Choisir le silence
Pour saisir la Parole,
Pour être ce disciple aux aguets
D’un mot, d’un ordre.

Fuir au désert
Mais rassembler dans la louange
Consentir à toujours commencer,
Traduire en patience
Le désir du royaume
Pouvoir être trahi sans cesser
De croire aux l’hommes

Voir l’univers
A sa mesure véritable,
L’univers comme un point lumineux,
Léger grain de sable
Que l’Amour transfigure ;
Savoir que toute chose est en Dieu
Précieuse et pure.
"L'âne se jette à l'eau" aux éditions Médiaspaul.