14 novembre 2016

L'Amérique !


A en croire les reportages télévisés qui s’en sont donné à cœur joie, les Etats Unis viennent de se donner un président cow-boy au terme d’une campagne western qui n’a ménagé ni les coups de gueule et ni les coups bas. Des amis ont réagi sur le champ : « Heureusement, nous avons en France des candidats qui ont plus de tenue ! » Je ne partage qu’en partie leur satisfaction. Ne nous y trompons pas ! Ces élections américaines ne sont que l’épiphénomène d’une tendance générale qui rejette des systèmes démocratiques jugés incapables de donner aux citoyens une identité à la fois reconnue et paisible. Cet épisode électoral, qui plonge la planète dans un avenir incontrôlable, signe non seulement l’échec de Mr Obama à se donner un successeur capable de faire aimer « son » Amérique, mais aussi celui de chaque européen que nous sommes par l’Histoire, si ce n’est par la raison. En effet, nous voyons monter de tous les pays d’Europe, pour ne parler que d’elle, des mouvements populistes et extrémistes vomissant une classe politique et des institutions, qui n’ont pour seul objectif que de favoriser le pouvoir de professionnels de la politique.


Depuis des décennies, nous avons cru naïvement,  qu’en dotant nos pays de structures et d’institutions démocratiques, ceux et celles qui en bénéficieraient ne pouvaient que devenir des citoyens conscients et responsables. Tombés dès la naissance dans le chaudron de la démocratie, ils seraient, comme Obélix, immunisés définitivement contre toute tentation totalitaire ou contre un usage pervers de ces institutions. Imprégnés que nous étions d’une vision horizontale de la société humaine, nous avons simplement oublié que rien n’est automatique en matière de gouvernement des hommes et que la collectivité ne pallie jamais l’absence d’un engagement personnel. Le soubassement institutionnel était certes nécessaire. Par contre, le volet éducatif qui permet à chacun de connaître et d’apprécier les raisons d’être de cet état de fait, a, en grande partie, fait défaut. Tout se passe comme si le 11 novembre les autorités municipales rassemblaient le peuple autour du monument aux morts sans en rappeler le sens par le discours d’usage ; ou comme si un rite liturgique était célébré sans qu’une parole ne l’accompagne ; ou encore, comme si des parents se contentaient de faire respecter  par les enfants les règles de la vie en famille, sans les ouvrir aux valeurs de l’unité de cette cellule de base et du respect dû à chacun.


Oui, nous sommes tous coupables (Ecole, Etat, Eglises, Medias, Corps intermédiaires) d’avoir négligé la formation, l’explication, le débat sur ce qui fait le socle de nos sociétés et qui s’avèrent indispensables à provoquer l’assentiment personnel. Ne nous étonnons pas que, dans ces conditions, certains, y compris parmi les responsables politiques, veuillent se débarrasser d’institutions qui, sorties de l’esprit qui les a fait naître, sont, pour eux, devenues des carcans. Ils se disent prêts à essayer d’autres expériences de vie en commun.


Mais, attention ! A trop vouloir un système démocratique qui ne tremble pas, qui ne tâtonne pas, nous risquons de nous réveiller avec un totalitarisme « librement consenti » ! L’édifice de la démocratie repose sur un équilibre toujours instable entre des forces contraires et son exercice exige un doigté et une souplesse qui s’accommodent mal des outrances et des simplismes. On nous dit : « Le peuple a parlé » ! Certes il a parlé, mais il n’a pas tout dit. Nous savons qu’un peuple flatté peut se laisser aller à l’impuissance, tout comme un peuple chauffé à blanc  peut dégénérer dans la horde violente. La démocratie molle comme la démocratie dure sont tentées de diviniser le peuple. Or le peuple n’est pas Dieu. Il lui faut aussi écouter des voix  qui lui rappellent où se trouve le Bien Commun de la nation, de l’humanité et du cosmos tout entier. Il lui faut des accompagnateurs éclairés et pas seulement des suiveurs.


Nos « élites républicaines » seraient bien inspirées de promouvoir une pédagogie nationale dédiée à l’éducation permanente  des citoyens d’un Etat de Droit et… de Devoir, si elles veulent avoir un jour des successeurs à la hauteur des défis qui seront les leurs.






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"L'âne se jette à l'eau" aux éditions Médiaspaul.