05 juillet 2009

Pas lui…

Les médias nous ont « gavés » et « regavés » de la mort de Michael Jackson. Chacun a le droit de penser ce qu’il veut de ce personnage pour le moins curieux. Par contre, le vocabulaire employé par ceux et celles qui déplorent sa disparition peut faire réfléchir. « Il ne devait pas mourir…pas lui…c’était mon dieu…mon idole…il m’aidait à vivre…il a subi un chemin de croix…c’est un martyr… je ne pourrais pas vivre sans lui…». Faut-il être à ce point sevré de religieux pour que ce besoin, inscrit dans la nature humaine, explose ainsi chez des millions de fans?
Comme je faisais remarquer cela à un jeune, celui-ci me répliqua : « Mais les premiers disciples n’étaient-ils pas tout bouleversés par la mort de Jésus ? » En effet, nous savons que l’idée de la Résurrection n’était pas étrangère à une partie du peuple juif et donc aux disciples de Jésus. Mais comment pouvaient-ils admettre que Dieu n’ait pas soustrait à la mort Celui qu’ils considéraient déjà comme son Fils ou du moins l’égal d’Elie ou de Hénoch qui furent emportés au ciel sans connaître la mort. On sait que Paul lui-même à un certain moment envisageait l’instauration du Royaume dès la première génération. Pas lui Seigneur !! Il a fallu repenser la Croix à la lumière de la Résurrection pour comprendre qu’elle était la suite logique de sa vie.
J’ai fait remarquer d’abord à mon jeune interlocuteur que Jésus, contrairement au chanteur, avait assumé sa nature humaine alors que ce dernier avait tout fait pour occulter ou transformer la sienne. Ensuite, Il n’a jamais revendiqué pour lui son succès auprès des foules, Il s’est échappé lorsqu’on voulait le couronner, Il a prêché non pas son Royaume mais celui du Père. Il n’a jamais concentré sur lui la gloire divine, Il n’est pas venu pour monter sur les podiums, pour battre des records d’affluence, pour amasser une fortune…Au contraire Il a considéré tout cela dès le début de sa « carrière » comme des tentations sataniques.
La vie et la mort de Jésus ont au contraire consisté à le « vider » totalement de lui-même au profit de Dieu son Père et des hommes ses frères. Sa mort n’a rien d’une apothéose humaine ; elle est la conséquence du refus des hommes et de son acceptation de se livrer à eux. Et c’est parce qu’Il a cru, qu’Il a fait confiance jusqu’au bout au désir du Père de diviniser l’homme qu’Il a affronté la mort et l’échec de sa vie sans chercher à s’en dispenser. Le cri du chrétien n’est pas : « Pas lui » mais « Par Lui, avec Lui et en Lui… »
Bref, Jésus nous a montré le coeur d’un Dieu qui n’est que déversement d’amour et le visage d’un homme qui n’est qu’icône et offrande de ce même amour…aux antipodes de l’idole qui retient la lumière dans un écrin jaloux pour mieux éblouir.

03 juillet 2009

Mariage de L et E.

L.et E. vous avez décidé de monter dans le même train. L’image est facile, j’en conviens, pour deux employés de la SNCF, mais elle est parlante.
Vous connaissez, bien sûr, ces trains de légende qui traversent les steppes de Sibérie ou qui grimpent les cordillères andines. Leur prestige et leur renommée ne parviennent pas à faire oublier la vie rude des chauffeurs de camions ou des conducteurs de mules, qui, de loin, les regardent passer. Ils couvrent la première page des magazines, ils emportent nos rêves mais nous restons sur le quai.
Vous connaissez, aussi, ces trains rapides et luxueux, partis avec grand fracas, beaux discours et baptêmes champagnisés et qui n’ont traversé qu’ennui et solitudes. Ils filent encore, propulsés par la vitesse acquise, mais, ils ont oublié, depuis longtemps déjà, le nom de la destination et celui des passagers.
Vous connaissez, encore, ces trains avec leurs équipages qui n’ont jamais quitté les gares de triages, par crainte d’affronter la distance et de perdre le cap. Ils tournent en rond dans le « train-train » quotidien ; ils finiront leurs jours dans des voies de garage ou des parcs à ferraille.
Vous connaissez bien ces trains dont on ne parle guère, qui partent le matin et qui arrivent à l’heure. Leur passage rassure les grands et ravit les enfants. Un jour, cependant, ils s’effaceront des tableaux d’affichage et tous comprendront alors, à quel point ils comptaient.
Vous connaissez ces trains vaillants et confiants, qui, par erreur d’aiguillage ou par accident, se sont trouvés brisés, disloqués, fracassés. Certains hésitant à reprendre le rail ont quitté la gare et n’y reviendront pas. D’autres ont attendu réparation, se ont ressoudés et sans faire les fanfarons ont repris du service avec obstination.
Vous connaissez, enfin, ces trains informes et grinçants, remplis jusqu’à la gueule qui, du matin au soir, fidèles et réguliers, déversent ces grappes humaines de fourbus, de pressés, de bavards, de discrets, de joyeux et de malheureux. Ils ont vieilli en usant les mêmes rails, ils ont mis du jeu dans leurs rouages mais ils ont permis belles rencontres et bons partages.
J’ai connu un train qui montait une célèbre rampe, une machine à l’avant, une autre à l’arrière. Il montait tout droit comme le petit cheval blanc, « tous derrière et lui devant ».
L et E, le train qui sera le vôtre aura peut être la couleur de ceux que vous connaissez déjà. Par le sacrement que vous allez recevoir vous mettez le Christ aux commandes de la machine de tête, il vous mènera à destination. Quant à la deuxième locomotive, ce sera l’Evangile. Il vous fournira une énergie durable et renouvelable, si vous savez entretenir sa flamme avec soin.

Que Mannick me pardonne elle qui connaît des bateaux tellement plus poétiques que mes trains…
"L'âne se jette à l'eau" aux éditions Médiaspaul.