06 mai 2007

Mains de campagne

Il y a d’abord les mains de la campagne tout court. Mains des vieux paysans, lourdes de travail, incrustées de peine, creusées de sillons profonds, déformées par l’effort, blessées par les intempéries, mutilées parfois par l’ingratitude des outils ; mains un peu gauches à trouver une position lorsqu’elles ne sont pas occupées à la tâche. Mains, vigoureuses mais plus fines, de leurs fils, déjà adaptées au clavier de l’ordinateur et aux touches du portable. Bénies entre toutes, ces mains calleuses et laborieuses qui donnent le pain des hommes et partagent celui de Dieu.
Il y a, aussi, les mains de la campagne électorale. Agitées et fébriles quand elles cherchent à toucher celle du potentiel président de la République, qui, à son tour, offre main droite et main gauche, regrettant de n’en avoir que deux à sa disposition. Bras de candidats qui se tendent et se balancent, les mains largement ouvertes en signe de communion : « Nous nous sommes compris, vous pouvez compter sur moi ». Bras en croix et poings serrés, rictus de l’effort pour dire la détermination : « On les aura ». Mains de l’Internationale, poing levé de la « lutte finale » et interminable. Mains nouées ensemble qui, l’espace d’un soir, savourent l’euphorie de l’union retrouvée. Enfin les mains « du jour de gloire est arrivé », lancées presque à la verticale, tendues vers la France virtuelle qui plane au-dessus de l’élu, consacré grand prêtre et intercesseur entre la patrie et son peuple.
Reste l’attitude du boudeur de service, abstentionniste professionnel, qui garde les mains propres, enfoncées dans les poches. Demain, il lui faudra bien, comme les autres, serrer la main de son voisin…et donc se compromettre un peu…

5 commentaires:

Anonyme a dit…

lu

Anonyme a dit…

"Comme tu tiens à ta pureté, mon petit gars! Comme tu as peur de te salir les mains. Eh bien, reste pur! A quoi cela servira-t-il et pourquoi viens-tu parmi nous? La pureté, c'est une idée de fakir et de moine. Vous autres, les intellectuels, les anarchistes bourgeois, vous en tirez prétexte pour ne rien faire. Ne rien faire, rester immobile, serrer les coudes contre le corps, porter des gants. Moi j'ai les mains sales. Jusqu'aux coudes. Je les ai plongées dans la merde et dans le sang."
Jean-Paul Sartre

Evidemment impossible de résister à la tentation de rajouter "les mains sales" à votre catalogue. A prendre avec un clin d'oeil bien sûr!

Anonyme a dit…

lu

Anonyme a dit…

J'ai beaucoup aimé la chute!!!!!!

Et j'aime aussi: "Aux innocents les mains pleines"

Anonyme a dit…

et ceux qui s'en lavent les mains au nom de Jésus ...
Annik

"L'âne se jette à l'eau" aux éditions Médiaspaul.