24 novembre 2006

Noël : Légende ou histoire ?

Aujourd’hui, aucun historien sérieux ne met en doute l’existence de Jésus de Nazareth. Les sources gréco- romaines, juives ou chrétiennes sont assez nombreuses et suffisamment fiables pour que le doute ne soit plus permis. « Le fait de douter que Jésus ait vraiment existé n’a aucun fondement et ne mérite même pas d’être réfuté » disait le théologien protestant Bultmann. Ceci concerne évidemment l’existence humaine de Jésus et ne préjuge en rien de la croyance ou non en sa divinité.
Mais la question qui se pose est celle-ci : Faut-il accorder quelque crédit aux récits évangéliques qui seront relus à l’occasion de Noël ? Sommes nous dans la légende ou dans l’histoire ?
Un lecteur attentif conviendra d’abord que la venue de Jésus dans le monde est décrite de manière relativement sobre par rapport à tous les récits de l’enfance des grands fondateurs d’empires ou de religions de l’antiquité. D’ailleurs les premiers chrétiens ont éliminé certains évangiles dits apocryphes qui faisaient une part trop belle à tout le merveilleux surajouté à la vie de l’enfant Jésus. Seulement deux évangiles sur quatre nous parlent de sa naissance, celui de Matthieu et celui de Luc. Marc, plus ancien, n’en dit pas un mot. L’essentiel pour les premiers disciples résidait plus dans l’évènement de la mort et de la résurrection du Seigneur que dans les détails de sa biographie. Ce n’est que plus tard et à la lumière de la résurrection que l’on s’est intéressé à l’origine de Jésus.
L’évangile selon Matthieu qui s’adressait plus spécialement à des Juifs insiste sur un point : Jésus est bien le Roi Messie que nous attendions dans la lignée du grand roi David. Il nous donne une généalogie de Jésus centrée sur Joseph, descendant de David ; il qualifie à plusieurs reprises Jésus de « Fils de David », né bien sûr à Bethléem cité de David.
Cependant le même évangile nous raconte l’épisode des mages qui semble tout droit sorti de l’imagination orientale de l’auteur. A lire de plus prés, nous voyons entrer en scène des mages qui ressemblent beaucoup aux prêtres perses très amateurs d’astrologie ; une étoile fait son apparition et nous savons déjà par un autre texte de la Bible que les Israélites attendaient que se lève un astre dans la personne de David (d’où l’étoile qui figure encore sur le drapeau israélien) ; enfin, on a fait de ces mages des rois grâce à une allusion au psaume 72. Et voilà que ces personnages déposent devant le petit bébé de la crèche l’or destiné aux rois, l’encens offert aux dieux et la myrrhe servant à l’embaumement du corps. Autrement dit cet épisode des mages n’est pas fait pour faire rêver les enfants mais pour nous rappeler que cet enfant est dès le départ considéré comme un homme, comme un roi et comme Dieu.
L’intention de Matthieu est claire. Il ne s’agit pas de nous donner un reportage sur la naissance de Jésus mais d’affirmer devant ses frères juifs que le messie-roi attendu est bien le charpentier de Nazareth et de rappeler aux autres que cet enfant est homme et Dieu à la fois.
L’autre récit, celui attribué à Luc est plus connu. Il est centré sur le personnage de Marie et laisse supposer que l’auteur a pris ses renseignements à la source auprès de la mère de Jésus. Luc se plaît à donner des noms (César,Quirinius) et des dates repérables ( un recensement) ce qui permet, entre autres repères, aux historiens d’aujourd’hui, d’avancer la date de naissance de Jésus de 4 ou 6 ans. Mais le plus intéressant dans le texte de Luc, c’est la description qu’il nous donne d’un couple de pauvres gens, exclu de l’hôtellerie, d’un enfant déjà marginalisé par sa naissance, et la place donnée à d’autres exclus que sont les bergers, premiers témoins de l’évènement et premiers ambassadeurs de la Bonne Nouvelle. La présence des anges confirme que Dieu est à l’origine de cette histoire et que le cosmos tout entier est concerné (¨…au plus haut des cieux et paix sur la terre…) La figure de Jésus qui se dessine ici est celle du « Sauveur » de tous et d’un sauveur qui aura l’allure d’un serviteur des hommes.

Ni légende ni histoire au sens où nous l’entendons aujourd’hui; les récits de Noël sont avant tout des paroles de croyants qui nous racontent un évènement unique à travers le prisme de la Foi en Jésus, Fils de Dieu. A ceux et celles qui s’étonneront de trouver des récits aussi différents, je propose un exercice. Après la lecture de cet article à plusieurs, essayez d’en faire le compte rendu. Vous verrez qu’il aura autant de présentations différentes que de participants. Nous ne connaîtrons jamais "l'histoire authentique" de la naissance telle que Jésus, Marie ou Joseph l’ont vécue, mais nous savons comment l’ont comprise les premiers témoins. N’en est-il pas de même pour l’histoire de chacun de nous ?

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Merci pour vos commentaires

J.CASANAVE a dit…

à mon tour de vous remercier André pour l'intérêt que vous portez à ces articles et la diffusion que vous en faites J.C.

"L'âne se jette à l'eau" aux éditions Médiaspaul.