09 mars 2006

L’Autre
Quand la mondialisation des échanges commerciaux et culturels ouvre tous les jours notre domicile à « l’étrange » ; quand les informations nous gavent tous les soirs de faits divers qui dénotent qu’une partie de nos contemporains ont une tout autre idée de la vie, de la mort, de la famille, du travail, il y a urgence à nous interroger sur l’Autre.
Il faut d’abord rappeler une évidence: nous ne sommes rien sans l’autre. Le début et la fin de notre vie nous obligent à constater que nous ne sommes que relation. S’il nous arrive de l’oublier quand nous atteignons notre jeunesse inconsciente ou notre maturité « triomphante », les évènements de la vie se chargent vite de nous recadrer.
Si notre être n’est que relation, notre identité elle-même, nous ne peut se construire sans référence à l’autre. Si j’étais tout seul flottant dans un ciel obscur je ne pourrais jamais savoir qui je suis. Ainsi la solitude n’est pas seulement souffrance de l’absence de l’autre, mais oubli effrayant de mon identité. S’il y avait une seule étoile dans ce ciel, je saurais au moins que je ne suis pas cette étoile. Je ne peux dire « je » que par rapport à un « Tu ».
Parallèlement à cet autre qui m’est indis-pensable, au sens où je ne peux pas me penser sans lui, l’autre est aussi celui qui m’impose une limite et c’est la prise de conscience de cette limite qui me fait accéder à le vie adulte. Il y a un moment où le gamin qui hurle pendant un repas doit se heurter à la présence des autres et ne plus se croire seul au monde. « L’autre sans qui nous ne pouvons pas vivre et à l’inverse celui dont la seule existence nous empêche de vivre » constate Luc Ferry dans un dialogue avec Marcel Gauchet.
Lévinas lui, nous mène encore plus loin (1). Il n’hésite pas à fonder la relation à l’autre sur un impératif éthique. L’autre n’est pas seulement l’objet indispensable de mon environnement ou le complément de moi-même toujours à la recherche de sa moitié. Mais si par le fait même que j’existe, je permets à l’autre d’être lui-même, alors le seul fait d’exister me rend responsable de l’autre.
Cette constatation pourrait nous accabler sous le poids de la responsabilité. Elle peut aussi se transformer en action de grâce. Qui que tu sois, tu es responsable d’une rose, dirait Saint Ex.
(1) Emmanuel Lévinas « Ethique et infini » cité précédemment.

3 commentaires:

Anonyme a dit…

J'ai bien lu, et avec intérêt.
Merci.

Anonyme a dit…

Bonjour Jean,
Je profites de ce court instant aprés les informations pour venir voir ton blog et je trouve cet article vraiment trés interessant. Au moment où je viens d'eteindre mon poste TV et où pendant 30mn des journalistes m'ont fait une synthése des événements les plus graves d'aujourd'hui dans le monde, je regarde différemment ton message.Je sui entiérement d'accord avec toi,seul nous ne sommes rien, nous ne sommes que parce qu'il existe une relation avec autrui. Et dans cet esprit me viens une question: comment des personnes qui vivent par exemple dans des monastéres (moines Boudhuistes, certaines catégorie de notre Eglise) (choix qui par ailleurs je respecte entierement) sans contact avec l'exterieur et avec parfois aucune relation entre eux peuvent-ils être "eux"? Est-ce qu'une relation avec le monde spirituel peut il suffire à se construire soit même?
Voilà ma quaestion du soir.
Sur ce je vais te laisser en te felicitant pour ton blog et la qualité et l'interet de tes sujets.
A bientot
Laurence G. de Lescar

J.CASANAVE a dit…

Merci Marc Jean.

"L'âne se jette à l'eau" aux éditions Médiaspaul.